Viktor Sidjak. Je ne le connais que de réputation. Une terrible réputation. Il était agressif, frappait très fort, et, paraît-il imprenable en parade-riposte. Il faisait tout le temps des parades-ripostes, à fond la caisse, sans qu'on puisse jamais trouver une ligne pour le tromper.

Hum..Je peux parler du sabre. Pour moi, ce n'est pas Jeff qui est "le" meilleur, bien qu'il ait un palmarès qui le situe dans les premiers. J'ai longtemps hésité entre ces cinq-là : Viktor Sidjak, Vladimir Nazlymov, Viktor Krovopouskov et Stanislas Podzniakov. Evidemment le palmarès de Podzniakov est remarquable. Mais celui qui m'impressionne le plus (j'ai tiré une fois contre lui à Budapest) c'est incontestablement Krovopouskov. Seuls ceux qui l'on vu tirer peuvent comprendre ce que je dis. C'était une machine, mais une machine "qui joue", et qui joue avec une intelligence et une finesse, à mon humble avis jamais égalée, sauf peut-être par Maffei, Nazlymov ou un Gedovari. Mais en disant cela je méjuge sans les connaître d'autres sabreurs pour lesquels j'ai aussi de l'admiration, comme les frères Touya.

Cependant, à l'époque de Krovopouskov, le règlement du sabre était très différent, on avait encore le droit aux flèches, aux passes avant. On pouvait temporiser à peu près comme on voulait. Il y avait une technique en mouvement plus complexe que maintenant, je crois, et c'est logique, vues les possibilités étendues qu'offrait l'ancien règlement, bien que je reste très impressionné par les fentes des sabreurs "modernes".

Pour moi, Krovopouskov était impossible à déstabiliser, à moins d'être plus puissant, plus équilibré, plus rapide, plus technique, plus lucide, et plus intelligent que lui…. Sa technique ultra-complète ne comportait aucune fioriture, et le jeu de jambes, mes amis, absolument sans aucune faille possible, même si dans ce domaine la référence absolue reste pour moi, Michael Bourtzev, un véritable félin. Krovopouskov savait tout faire en conservant cet équilibre et se positionnement dans sa garde qui donnait parfois l’impression d’être un peu raide ou figé. Mais ce n’était pas le cas : il maîtrisait tous les gestes du sabre, à la perfection, et sans aucun geste parasite. J’attribue cette étonnante capacité, en partie, à la puissance de ses jambes et aussi à une vista hors-pair.